En Vrac & sans Trac

textes & photos : ©RichardB

Les Cassandre peuvent se tromper

Partout leurs mea-culpa inondent nos écrans et noircissent les images de nos vies, leurs mots emplissent de fatalisme les colonnes de nos journaux.  Économie, écologie, culture, science, politique, rien n’est épargné dans leur quête du malheur quotidien. Eux ? les catastrophistes patentés, Nostradamus professionnels, gourous annonceurs d’une planète future dévastée – ignorant les souffrances de la planète actuelle – pleureuses modernes muselant toute émergence d’optimisme dans le dogme de leur pensée unique, celle de la désespérance et du refus du progrès. A part les nihilistes et anarchistes des siècles derniers qui donc a remis autant en cause l’homme et son action durant ces années 2000 ?

Et les médias les adorent ces Cassandre – « La catastrophe est l’aubaine médiatique par excellence » (Michel Onfray) – pensez-donc, pas une journée sans une catastrophe annoncée pratiquement en direct-live dans les chaumières grâce à la mondialisation de l’information et Internet. Pas une heure sans que statistiques d’avenir infernal et pourcentages de risques terrifiants ne nous soient infligés. Que d’images choc offertes aux avides JT, que de phrases sur-titrées pour une presse papier en état de survie économique, que d’opportunités pour tous les experts et spécialistes de tout cran, refoulés en temps ordinaire par le bon sens et la raison ! Le « Tout va mal ! tout ira mal ! » est le véritable fond de commerce de ces chantres des lendemains noirs, et il se vend bien dans la médiacrité actuelle (voir les piles de livres à la Fnac). Et surtout ne tentez pas la contradiction, voire même de souligner quelques incohérences, vous passeriez pour un réactionnaire sans scrupules (M. Allègre le sait). L’un de leur credo majeur : la planète meurt, la faute à l’homme. En fait, je crois que la planète se meurt de rire à nous regarder ainsi nous lamenter, pauvres insectes qui pensons en rythmer son existence.

De nos jours, toute la réflexion humaine affichée, donc vendeuse, devient émotionnelle, donc pathétique. La raison a disparu dans la compression du temps moderne. Et les vrais priorités sont reportées, oubliées.

« Pensez, c’est discerner l’excessif et le partiel d’avec le juste, le complet et le sûr« , l’adage de Jean Guitton devrait être affiché dans toutes les écoles, sur tous les frontons de la République, dans toutes les églises humaines, en tête des règles d’éthique des donneurs de leçons, qu’ils soient de gauche ou de droite, verts ou rouges, qu’ils fassent tourner des moulins à vent ou des centrales nucléaires, qu’ils ne soient qu’intellectuels en retrait ou responsables en action. ©RichardB

– Michel Onfray signe dans Le Point du 24 mars un article sur ce sujet ; Catastrophe de la pensée catastrophique (dans un dossier spécial Nucléaire assez bien fait).  Extraits : « L’un des signes du nihilisme contemporain se trouve dans le pessimisme : la quasi-totalité des problèmes d’aujourd’hui sont abordés sous l’angle du pire. La logique médiatique n’est pas pour peu dans la prolifération de cette négativité : elle ne vit que de la catastrophe. […] La catastrophe est l’aubaine médiatique par excellence. « 

Et pour détendre un peu les Cassandre… et les zygomatiques :

2011 - Posted by | Oh ! moi, ce que j'en dis....

2 commentaires »

  1. Il y a :
    – Il y a des pessimistes catastrophistes profitant d’une catastrophe pour décharger des images d’angoisse par fantasme ou par besoin,
    – Il y a des optimistes anti-catastrophistes pouvant à travers l’apologie confortable de l’optimisme et d’une foi en une catégorie incertaine d’hommes faire également même sans s’en rendre compte ou s’en préoccuper l’apologie du mensonge et de l’oligarchie, déplaçant toujours ailleurs un sujet, dans un autre temps, sous la responsabilité de quelqu’un qui sait mais qu’on ne connait pas et qui ne peut pas dire… laisser faire ce qui ne va pas…
    – Il y a des gens voguant dans la médiacrité, certains sont sûrs d’eux, d’autres pas
    – Il y a aussi des gens qui cherchent à savoir… une crise, une catastrophe… peuvent révéler de nombreux dysfonctionnements d’un système, encore faut-il pouvoir les chercher et les voir. Période d’émotion alors peut-être (découverte et assimilation du réel) sans que l’émotionnel fasse perdre raison… le mensonge peut alors amplifier la tension et c’est parfois peut-être naturel et bien, là encore sans faire perdre raison. Du moins pas à tous, à certains oui et des méthodes de gouvernement ou de management d’ailleurs l’utilisent, comme elles utiliseront également les « optimistes par erreur ».
    – Il y a des gens qui en défendent d’autres malgré eux
    – Il y en a qui font l’inverse
    – Il y a… Etc…

    L’émotion n’est-elle que dangereuse, n’est-elle pas aussi nécessaire ? L’empathie (au sens ressentir, vivre, souffrir ce que vit l’autre) est peut-être une base forte d’un sentiment réel de justice, parce qu’alors, soi-même et sans calcul, on n’y échappe pas non plus.

    Dans Le Point du 24 mars, « Catastrophe de la pensée catastrophique » Michel Onfray ne fait pas que parler de l’esprit catastrophiste (qui, dit comme ça, est d’ailleurs par définition négatif), il n’incite pas à ne pas voir, ni vivre ni comprendre une catastrophe… Dans sa conclusion, il dit également : « Si l’on construit ses villes au pied d’un volcan, il ne faut pas s’étonner un jour qu’elles disparaissent sous la lave et sous les cendres. »… « ces bombes atomiques japonaises potentielles »… « pour ou contre les pleins pouvoirs »… « il est temps que, comme avec la diplomatie et la politique étrangère qui échappent au pouvoir du peuple, les élites rendent des comptes aux citoyens »… « notre démocratie est une catastrophe. »

    User de raison nécessite d’avoir de l’information, de discerner le vrai du faux également. Et quand il y a mensonge manifeste et possible forte responsabilité, il peut devenir également irresponsable de laisser les falsificateurs effacer les traces. Emotion face à la catastrophe humaine, choc également face à l’irresponsabilité humaine, questionnement par rapport à l’homme construisant des systèmes qu’il ne maîtrise pas… pourquoi pas les trois…

    Un autre lien abordant quelques thèmes intéressants en relation :
    – Hubert Reeves – Fukushima : on a laissé jouer des enfants avec des allumettes : http://www.courtois.it/?q=content/fukushima-laiss%C3%A9-jouer-des-enfants-avec-des-allumettes
    Personnellement, je trouve son principe « d’humains trop humains » assez fort et comme devant faire partie du débat.

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    Commentaire par Elaine Isnard | 2011

  2. Merci pour ce long commentaire, Elaine.
    Un vaste débat en effet sur ceux en charge de responsabilités (politiques – au sens très large du terme), sur ceux dont le devoir est d’informer (médias et journalistes) et sur tous ceux qui suivent comme ils peuvent(la population). Mes propos s’attachaient surtout aux avides médias mais aussi à une quatrième catégorie (qu’on retrouve dans ta liste) celle des profiteurs qui usent du fond de commerce de la catastrophe à des intérêts n’ayant rien à voir ni avec la responsabilité, ni avec l’information, encore moins avec l’intérêt général (cela dépasse bien sûr l’affaire du nucléaire). Ils brouillent l’analyse des choses en usant et abusant de l’émotionnel et du sensationnel – sans jamais demander une quelconque responsabilité dans ces choses.
    Quant au Japon, OUI, que dire de cette stupidité du choix des emplacements des centrales ? mais que dire aussi du nombre de villes rayées de la carte par le tsunami, villes construites en bord de mer ? rien, parfois les décisions humaines sont dramatiquement étonnantes. Mais, en prenant de la hauteur sur l’événement japonais (les trois événements : tremblement de terre, tsunami, accident nucléaire), rien ne me fera accepter les remises en cause à chaud et globales de certains oiseaux de mauvais augure à qui je pourrais aussi prédire de conduire le monde à sa perte en imposant leur point de vue.
    Je lis tout autant Reeves qu’Allègre pour ce qui concerne l’écologie. Un bon lien que tu as donné ici.
    A bientôt de te lire sur d’autres thématiques moins… catastrophiques. Cordialement. Richard

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    Commentaire par RichardB | 2011


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